Pourquoi Israël doit s’inquiéter de la reconquête de « Homs » par Assad
Homs, troisième ville de Syrie, a été reconquise par l’armée régulière d’Assad. « Reconquise » est en fait un mot qui ne décrit pas la réalité. Disons pour coller un peu plus à la vérité que sa reddition par les rebelles a fait l’objet d’une tractation entre la Syrie, le Hezbollah, l’Iran, les rebelles sunnites (plusieurs factions) et l’ONU. Lorsque les 1.500 derniers rebelles ont quitté la ville, convoyés par l’ONU vers le nord dans des cars que l’institution avait affrétés, les Alaouites et les chrétiens qui avaient fui les zones de combat, et qui sont revenus, ont été surpris par le calme qui régnait dans la cité. Ils racontent aux télévisions étrangères avoir été ébranlés par les regards ahuris de ceux qui se terraient et n’avaient jamais quitté les lieux. Ahuris ils pouvaient l’être : les maisons détruites, les immeubles éventrés étaient témoins de la violence des combats.
Les ruines que les fuyards ont retrouvées n’étaient que des lambeaux d’une ville d’un million d’habitants qui avait été jadis florissante. Ces maisons ont été détruites par deux années de combats incessants durant lesquelles la famine et les effusions de sang ont régné en maître. Avant son abandon par les irrédentistes, Homs avait été nommée « capitale de la révolution » par les rebelles qui avaient établi leurs bases dans les quartiers sunnites.
Que peut représenter cette victoire ?
On ne peut éviter de s’interroger : si la reprise de Homs par les réguliers représente une victoire importante pour le régime d’Assad, est-ce à dire qu’il a pris un ascendant sur la guerre civile et a changé par là-même les rapports de force au Moyen-Orient ? L’on connait approximativement les antagonistes : d’un côté la Syrie, assistée par l’Iran, le Hezbollah, les chiites d’Irak et la Russie. De l’autre les rebelles sunnites d’obédience diverses, assistés par l’Arabie Saoudite, le Qatar, la Turquie de la Jordanie et des Etats-Unis. Il est difficile d’avancer un pronostic, car Alep, la deuxième plus grande ville du pays, est encore entre les mains des insurgés. Mais la reprise d’Homs par le pouvoir est un symbole. Elle annonce un changement qu’Israël est obligé de prendre en compte : le renforcement du Hezbollah. On sait qu’Israël a joué un rôle mineur (ou secret) face au déséquilibre des forces en Syrie. Sur le plan humanitaire, l’Etat Juif a soigné les blessés qui traversaient la frontière, sachant qu’ils étaient parfois des civils syriens, parfois des rebelles. Tsahal a également, pour des raisons sécuritaires, empêché que des missiles russes sophistiqués soient acheminés vers le Liban pour renforcer l’armement du Hezbollah, même si l’armée israélienne n’a jamais commenté ces faits d’arme. Elle a défendu sa frontière lorsque celle-ci était menacée. Mais tous ces événements n’ont été que le résultat d’une tactique, faisant partie de la stratégie globale israélienne. Le Hezbollah est déjà surarmé de missiles de courte et moyenne portée. Mais le vrai paramètre qui oblige Israël à opérer un changement dans sa stratégie, c’est l’apparition d’une force militaire aguerrie, disciplinée et arrogante du fait de ses victoires. Et cette apparition est par-dessous tout une consolidation de la puissance iranienne. Elle fait naître dans l’esprit des stratèges militaires israéliens une remise en question des données sur l’équilibre des forces entre les sunnites, qui ont perdus pied dans leurs propres Etats tel que l’Egypte et en Syrie, et les chiites dont l’ambition première est de régner en maître absolu au Moyen-Orient. La victoire du camp d’Assad sur Homs a par conséquent changé les rapports de force. L’instabilité flagrante des uns et des autres était un atout entre les mains d’Israël ; désormais, l’apparition du Hezbollah, non plus comme une force d’appoint de l’Iran mais comme un ennemi organisé, farouche et déterminé, va faire l’objet d’une profonde réflexion d’Israël sur sa propre sécurité.